Après La Camarista (2018), puissant portrait social d’une femme de chambre travaillant dans un luxueux hôtel de Mexico, Lila Avilés signe avec Tótem, son second long-métrage, un récit bouleversant sur la vie et la mort. C’est au sein d’une famille nombreuse, et à travers le regard d’un enfant dont le père est malade de cancer, que se déploie cette histoire sensible et poignante présentée à la Berlinale en 2023.
Une famille mexicaine
Comment réagit un enfant face à la maladie d’un proche ? Comprend-il la finitude de la vie ? Quel rôle endosse la famille dans tout cela ? Voici quelques-unes des questions auxquelles essaie de répondre le film de Lila Avilés. La protagoniste de Tótem, une fillette de 7 ans nommée Sol (Naíma Sentíes), est confrontée à la mort imminente de son père (Mateo García Elizondo) gravement atteint d’un cancer.
Le film se déroule sur une journée dans la grande maison familiale. Tous les membres de la famille, petits et grands, sont occupés avec les derniers préparatifs de la fête d’anniversaire de Tona, le père de Sol, qui aura lieu le soir même. Si au premier abord Sol, semble ne pas bien comprendre pourquoi elle ne peut pas déranger son père qui se repose dans sa chambre, elle a déjà en réalité intégré à sa façon, avec ses yeux d’enfants, que quelque chose est en train de changer.
La famille, le foyer, est un lieu fondamental dans Tótem, chaque membre y a sa place, y retrouve ses racines et s’y soutient. Même si parfois, elle peut aussi être source de conflits et de rapports difficiles entre ses membres. « J’avais envie de dépeindre cet univers. J’aime le langage, j’aime montrer comment les membres d’une même famille se parlent, avec de l’argot et des messages codés. Certains mots et rituels ont une signification propre à une famille, mais pas à une autre. Il est nécessaire que l’individualité de chacun soit comprise et respectée, sinon, ce serait comme ouvrir une boîte de Pandore », explique la réalisatrice mexicaine.
Les différentes manières de faire face à la douleur
Chacun des personnages du film a sa propre façon de gérer la douleur. Lila Avilés excelle sur ce point en dotant chaque membre de la famille de traits de caractères spécifiques. Il y a ceux qui insistent pour que le gâteau soit parfait, même s’ils manquent une grande partie de la fête en restant à la cuisine. Il y a ceux qui s’inquiètent de l’argent qui commence à manquer pour offrir au malade le meilleur traitement possible. D’autres encore qui font appel à des guérisseuses afin de chasser les mauvais esprits de la maison. Enfin, bien entendu, il y a ceux qui cherchent à dire tout simplement au revoir dans une dernière étreinte ou quelques paroles maladroites.
Quant au malade, artiste peintre de profession, c’est dans une magnifique scène avec sa fille qu’il lui offre son dernier tableau, le seul qui n’ait pas été détruit, peint avec beaucoup de difficultés en période de convalescence. Une peinture symboliquement forte pour Sol et dans laquelle apparaissent tous ses animaux préférés. C’est sa façon à lui de transmettre à son enfant chéri un héritage émotionnel pour la postérité.
C’est avec beaucoup de délicatesse que la caméra de Lila Avilés plonge dans l’intimité de cette famille en souffrance. Une famille qui, en dépit des épreuves, est plus vivante que jamais et fait du mieux qu’elle peut en érigeant avec cette dernière fête d’anniversaire un rempart face à la maladie.
Crédits photos : Les Alchimistes (photo de couverture)
FICHE DU FILM
- Titre original : Tótem
- De : Lila Avilés
- Avec : Naíma Sentíes, Montserrat Maranon, Marisol Gasé, Mateo García Elizondo
- Date de sortie : 30 octobre 2024
- Durée : 1h35 min
- Distributeur : Les Alchimistes