Présenté au festival international du cinéma de Toronto, le premier long métrage de Laura Baumeister raconte l’histoire d’une fillette et de sa mère dans une situation d’extrême pauvreté qui habitent au bord d’une décharge publique au Nicaragua. Avec ce beau film parsemé d’éléments fantastiques et de scènes d’une grande délicatesse, la cinéaste aborde le monde de l’enfance, le sentiment d’abandon et signe un plaidoyer écologique pour la planète.
La plus grande décharge à ciel ouvert du Nicaragua
Il existe des images, des expériences fortes qui restent imprimées dans la mémoire et nous accompagnent pendant longtemps. Ce fut le cas pour Laura Baumeister lorsqu’elle découvrit La Chureca, un lieu qui s’est affirmé au fil des années comme le point d’ancrage de son premier projet cinématographique : « Le point de départ fut un endroit très important : La Chureca, la plus grande décharge à ciel ouvert du Nicaragua. J’y étais déjà allée quand j’étais adolescente et je n’ai jamais pu l’oublier. Le contraste entre les montagnes de déchets et l’un des plus beaux paysages de mon pays natal (la côte du lac Xolotlán et ses reliefs montagneux) m’a profondément choquée, ce qui causa le début d’une longue réflexion. »
Juste à côté de ce vaste dépôt de déchets, un site à priori malsain où la pollution cause des ravages sur l’environnement et l’être humain, la jeune cinéaste découvre avec stupéfaction des hommes et femmes qui se sont installés : « Un autre aspect qui m’a beaucoup touchée était les locaux, ceux qui vivent sur la décharge. Plus particulièrement leur capacité, cette énergie créative, à se réapproprier et à réinterpréter les objets pour leur donner une seconde vie. » Ainsi, lorsqu’elle a dû choisir un endroit pour parler de la séparation entre une mère et sa fille, La Chureca s’est imposée rapidement comme une évidence.
Une mère et une fille
Le quotidien de María, interprétée par la lumineuse Ara Alejandra Medal, 11 ans, et de sa mère Lilibeth (Virginia Sevilla), est loin d’être simple. Elles survivent grâce à des objets qu’elles récupèrent dans la montagne d’ordures qui s’érige près de leur cabanon de fortune fait de toile et de bouts de bois. Pour mieux s’en sortir, elles élèvent également une portée de chiots de race pour un voyou local. Lorsque l’affaire tombe à l’eau, Lilibeth décide de se rendre en ville pour travailler et dépose María dans un centre de recyclage géré par un couplé où demeurent aussi d’autres enfants. Mais les jours s’écoulent et Lilibeth, en dépit de sa promesse, ne revient pas …
Avec La hija de todas las rabias, Laura Baumeister explore avec beaucoup de sensibilité et de tendresse la relation entre une mère et sa fille et la façon dont ce lien perdure, et même se renforce dans les circonstances les plus adverses. Ainsi, Lilibeth apprend à María à s’en sortir, elle qui voit sa mère comme une sorte de panthère qui la protège, veille sur elle et qui peut tout réussir.
« En tant que mammifères, le lien mère-enfant est le plus fort que nous ayons, c’est le portail par lequel nous venons au monde, et nous dépendons de cette personne pendant longtemps : notre survie en dépend. Et il y a quelque chose qui m’intéresse beaucoup dans cette fragilité : comment un enfant survit-il sans sa mère ? Comment une mère peut-elle préparer son enfant à quelque chose d’aussi douloureux que sa propre disparition ? »
Crédits photos : Tamasa Distribution (photo de couverture)
FICHE DU FILM
- Titre original : La hija de todas las rabias
- De : Laura Baumeister de Montis
- Avec : Ara Alejandra Medal, Virginia Raquel Sevilla, Noé Hernández
- Date de sortie : 13 septembre 2023
- Durée : 1h30 min
- Distributeur : Tamasa Distribution