Amateurs de flamenco, on peut dire que vous êtes gâtés ! Quelques semaines à peine se sont écoulées depuis le formidable concert de Rafael Riqueni et Estrella Morente au Théâtre du Châtelet qu’il vous suffit à présent de traverser la rue pour vous rendre au Théâtre de la Ville et écouter l’une des plus grandes voix du flamenco contemporain… Duquende ? Un cantaor de légende, tout simplement !
Un talent précoce
N’en déplaise à Corneille, dire que le talent n’attend pas le nombre des années revient à enfoncer une porte ouverte sur la grande galerie des poncifs… Mais pour autant, cette maxime prête à consommer n’est pas dénuée de fondement et dans le cas précis de Duquende, force est de constater que ce cliché – aussi éculé soit-il – a force de vérité.
Être invité sur scène et adoubé à l’âge de huit ans par Camarón de la Isla, ce n’est pas rien, assurément ! Le jeune Juan Cortés Santiago, que l’on ne surnomme pas encore Duquende, gardera de cette rencontre avec le légendaire cantaor un souvenir impérissable. Camarón de la Isla sera son guide, son modèle artistique absolu tant et si bien qu’aujourd’hui, il maitrise sur le bout des doigts l’essentiel de son répertoire.
À l’instar de son illustre aîné, Duquende a dédié sa vie au flamenco et son parcours artistique hors normes l’a amené à collaborer avec les plus fines gâchettes de la guitare flamenca, de Tomatito à Paco de Lucía tout en passant par Vicente Amigo, Juan Habichuela, Niño Josele ou Chicuelo.
S’il a commencé à chanter dès son plus jeune âge dans les cafés de sa ville natale de Sabadell, sa carrière « officielle » ne prend son envol qu’à la fin des années 80 avec la publication d’un premier album studio, Fuego, primo, fuego (1988) suivi quelques années plus tard des très remarqués Duquende y la guitarra de Tomatito (1993) et Samaruco (1995) qu’il défendra sur les scènes d’Espagne et d’Europe, notamment à Paris où le Théâtre des Champs-Élysées lui ouvre en grand ses portes en 1996.
C’est un an plus tard, en 1997, qu’il intègre le Paco de Lucia Sextet à la demande expresse du maestro. Il s’initie alors au flamenco-fusion aux côtés de musiciens pétris de talent tels que le bassiste Carles Benavent ou le saxophoniste Jorge Pardo. Cette collaboration entre Paco de Lucía et Duquende se poursuivra plus de quinze ans et enfantera de plusieurs sommets du flamenco contemporain comme l’incontournable Luzia (1998) notamment…
Le cante jondo et au-delà…
Comme un cri brûlé sous le soleil ardent d’Andalousie, la voix puissante et viscérale de Duquende exprime tous les tourments de l’âme propres au cante jondo. Un flamenco instinctif et primal, comme sur cette poignante seguiríya surgie du fond des âges qu’il incarne avec passion.
S’il est assurément l’une des plus grandes voix du cante jondo, le natif de Sabadell s’est aussi ouvert tout au long de sa carrière à d’autres sensibilités, tant au sein du Paco de Lucía Sextet où les digressions jazz étaient légion que dans la grande famille des musiques du monde, avec notamment le projet Qawwali-Flamenco (2006) sur lequel il retrouvait Miguel Poveda, Chicuelo, mais aussi et surtout le chanteur pakistanais Faiz Ali Faiz, héritier naturel de Nusrat Fateh Ali Khan et figure emblématique du qawwali.
Sur la scène du Théâtre de la Ville
C’est aux côtés du guitariste Pepe Fernández, de la danseuse et percussionniste Sabrina Romero et du pianiste Juan Vicente Abardonado que Duquende nous donne rendez-vous pour un tour de chant qui s’annonce intense et habité.
Si Pepe Fernández et Sabrina Romero ont déjà croisé à plusieurs reprises la route de Duquende, la grande inconnue de ce concert réside en la présence sur scène du jeune pianiste Juan Vicente Abardonado, dont on ne sait pas grand chose si ce n’est que ses racines sont à chercher du côté des Saintes-Maries-de-la-Mer et qu’il s’est illustré comme arrangeur pour Nicolas Reyes et Tonino Baliardo des Gipsy Kings.
Une guitare, une voix, de la danse, des percussions, un piano, ce concert de Duquende préfigure mille et une nuances de flamenco, du cante jondo traditionnel à des envolées flamenco-fusion tout en passant par l’exploration du répertoire de ces figures tutélaires que furent pour lui Camarón de la Isla et Paco de Lucía…
Crédits photo principale : Duquende © AnaPalma
INFORMATIONS PRATIQUES
- ARTISTE : Duquende
- AVEC : Duquende, Pepe Fernández, Sabrina Romero et Juan Vicente Abardonado.
- DATES & HORAIRES : Le 27 janvier 2025 à 20h
- LIEU : Théâtre de la Ville
- ADRESSE : Théâtre de la Ville – Sarah Bernhardt, 2 Pl. du Châtelet, 75004 Paris M° Châtelet
- TARIFS : De 10 à 30 €
- RENSEIGNEMENTS : www.theatredelaville-paris.com