Elle nous a enivré avec sa voix unique, gorgée de mélancolie, pendant près de deux décennies. Pour son second long métrage, Ana Sofia Fonseca a choisi de brosser le portrait de la grande chanteuse du Cap-Vert, Cesária Évora. À travers son documentaire, la jeune réalisatrice dévoile une vie marquée par les difficultés, faite d’ombres et de lumières et qui, bien au-delà de la figure de l’immense artiste qu’elle était, révèle une femme libre et profondément attachée à ses racines.
L’origine du film
Comme la plupart d’entre nous, Ana Sofia Fonseca a découvert la grande dame de la chanson cap-verdienne au début des années quatre- vingt-dix lors de son premier succès et quelque chose dans le destin de cette grande diva l’a rapidement captivé. Mariée à un Cap-verdien, la réalisatrice possède une maison à deux pas de celle de Cesária Évora. « J’avais envie de comprendre comment une artiste noire et pauvre était passée de l’indigence à la célébrité à l’âge de 50 ans, tout en restant elle-même. Trois jours après ses funérailles, en 2011, je me tenais devant ma maison sur l’île de São Vicente, qui se trouve à deux pas de la demeure de Cesária. Je pouvais voir la tristesse dans les yeux d’un peuple orphelin. Ce jour-là, je me suis dit pour la première fois qu’il faudrait faire un film sur cette femme incroyable. Mais à l’époque, j’étais encore loin d’imaginer que je réaliserai un film sur elle un jour. »
Pour cette ancienne journaliste, réalisatrice de documentaires pour la télévision portugaise, faire un film sur Cesária Évora est devenu une évidence. Elle se lance alors à la recherche de documents et contacte des dizaines et des dizaines de personnes de l’entourage de l’artiste. C’est seulement au bout d’un an qu’elle met enfin la main sur des images et des archives, notamment des vidéos retrouvées par son manager, faites avec sa caméra.
De la petite fille orpheline au succès planétaire
Difficile d’oublier la première fois que l’on a entendu chanter Cesária Évora. Bouleversé par sa prestation dans un bar-restaurant du centre de Lisbonne, le producteur, José Da Silva lui propose de venir à Paris et organise dans la foulée une tournée des concerts. C’est de cette façon, par le plus grands des hasards, que le public découvre la diva aux pieds nus alors qu’elle a déjà plus de 50 ans. « Cette unique et bouleversante émotion qui m’envahit quand j’entendis pour la première fois la voix de Cesária me fit tout de suite sentir qu’il était de mon devoir de faire découvrir aux autres cette voix. J’étais certain que tout le monde ressentirait la même émotion. La voix de Cesária ferait pleurer le monde entier. »
Le parcours de Cesária Évora a quelque chose d’extraordinaire, qui n’appartient qu’aux grands artistes, ceux qui écrivent en lettres d’or leur propre légende et c’est exactement ce que montre ce superbe documentaire d’Ana Sofia Fonseca. La cinéaste portugaise retrace avec beaucoup d’humanité et de respect la vie de cette femme née dans une ancienne colonie dans la précarité la plus absolue. Une femme qui a dû se battre pour élever sa propre famille, pour se sortir de la dépression et vaincre l’alcoolisme. Une femme qui a connu un succès planétaire, mais qui a toujours su rester fidèle à elle-même et qui est parvenue à mettre la morna cap-verdienne au centre des musiques du monde.
Retrouvez ici l’interview d’Ana Sofia Fonseca
Crédits photos : Epicentre Films (photo de couverture)
FICHE DU FILM
- Titre original : Cesária Évora, la diva aux pieds nus
- De : Ana Sofia Fonseca
- Avec : Cesária Évora
- Date de sortie : 29 novembre 2023
- Durée : 1h34 min
- Distributeur : Epicentre Films