Elle nous surprend toujours par le courage et la force que dégagent les personnages de ses films. Pour son dernier long-métrage, Icíar Bollaín a choisi de nous raconter l’histoire poignante de Maixabel, la veuve de Juan María Jáuregui, assassiné en 2000 par l’ETA. Nul doute qu’avec Les Repentis, la réalisatrice madrilène signe l’un de ses meilleurs films. C’est avec réalisme, intelligence et une infinie délicatesse qu’elle parvient à mettre en lumière le parcours d’une victime souhaitant par-dessus tout rencontrer les bourreaux de son époux.
Maixabel Lasa, une femme hors du commun
On se rappelle encore de Pilar, rôle principal de Ne dis rien (2004), victime de violences conjugales qui décide de s’enfuir pour survivre ou encore d’Alma dans L’Olivier (2016), qui va remuer ciel et terre pour récupérer l’olivier millénaire de son grand père. Dans le cinéma engagé d’Icíar Bollaín, les perdants et les laissés-pour-compte deviennent des héros, des êtres habités par une détermination et une capacité de lutte inébranlable.
Lorsque les producteurs l’ont contacté pour réaliser un film sur les rencontres entre victimes et terroristes repentis de l’ETA, mises en place à l’époque par le gouvernement basque, elle a rapidement réalisé qu’elle souhaitait raconter l’histoire de Maixabel Lasa. En effet, cette dernière était l’une des onze personnes qui avaient acceptées de parler avec les ex-membres de l’organisation terroriste : « La plupart de ces onze personnes ont rencontré des ex de l’ETA qui n’étaient pas liés directement aux attaques dont elles furent victimes, alors que Maixabel a été confrontée à l’homme qui avait assassiné son mari. L’issue de leur histoire était également extraordinaire et cela nous a vraiment donné l’envie de raconter cette histoire-là. »
À l’époque, la démarche de Maixabel avait fortement marqué les esprits. Elle ne cherchait pas à pardonner les individus qui avaient tué froidement son mari, mais à leur donner une seconde chance. Avec ces rencontres, elle leur offrait la possibilité de s’exprimer, de se confronter à leurs propres actes et de les regretter. Face à la violence et à l’image de son mari, elle s’est toujours battue pour le dialogue et la défense du principe de réinsertion.
Une histoire de victimes et de bourreaux
L’une des grandes réussites du film est également d’aborder sans fard le revers de la médaille. Icíar Bollaín ne se contente pas de dévoiler uniquement le parcours des victimes, elle s’intéresse aussi à celui des terroristes. « À l’évidence, on a d’abord approché Maixabel et sa fille, mais dans la conversation, ceux de l’autre côté nous sont également apparus forts. On a alors creusé et fait des recherches sur ces hommes qui avaient embrassé la lutte armée et on s’est aperçu qu’on en savait peu sur eux » explique-t-elle.
Pour interpréter le rôle principal, Icíar Bollaín a fait appel à l’une des actrices les plus réputées du cinéma espagnol, Blanca Portillo, qui a remporté le Goya de la meilleure interprétation féminine. Elle campe avec brio cette femme extraordinaire, remplie d’humanité, capable d’offrir une seconde chance à ceux qui lui ont causé les pires souffrances. À ses côtés, le talentueux Luis Tosar se glisse de façon saisissante dans la peau d’Ibon Etxezarreta, l’un des assassins du politique basque. Sans non plus oublier Urko Olazabal qui signe une extraordinaire interprétation dans le rôle d’un ex-membre de l’ETA.
Retrouvez ici l’entretien avec Icíar Bollaín.
Crédits photos : Epicentre Films (photo de couverture)
FICHE DU FILM
- Titre original : Les Repentis
- De : Icíar Bollaín
- Avec : Blanca Portillo, Luis Tosar, Urko Olazabal
- Date de sortie : 9 novembre 2022
- Durée : 1h56 min
- Distributeur : Epicentre Films